Mener une guérilla consiste à mener des actions de harcèlement ou des embuscades en milieu urbain. En marketing, le terme définit des actions ou supports provocants qui débordent du cadre publicitaire et s’emparent des infrastructures du domaine public.
Un fait d’actualité récent a fait l’éclatante démonstration de la différence de culture qui nous sépare de nos voisins français. Les opérations menées par les agriculteurs en colère des deux côtés de la frontière ont pris, en effet, des formes bien différentes !
Les agriculteurs français ont pris la route pour créer un blocus autour de Paris. Les péages bloqués, les road-trips en compagnie de journalistes ont alimenté les téléjournaux pendant plusieurs semaines. Mais les images qui ont le plus marqué les esprits sont celles des pulvérisations de purin sur les façades de la préfecture d’Agen, passant à un stade supérieur dans l’engagement physique et la déprédation, une vraie guérilla urbaine en quelque sorte.
Quelques jours plus tard, ce sont les paysans suisses qui ont à leur tour élevé la voix. Leur rassemblement, filmé par drone dans les campagnes, se situe à l’intersection de la flash-mob et du land art. Les images, très largement relayées par les médias, ont présenté leur combat comme un appel à l’aide bien plus que l’expression d’une colère. Savamment orchestrée, synchronisée et probablement soutenue d’un accompagnement RP efficace, cette opération a été bien plus courte que le marathon de leurs homologues français, étant très vite largement médiatisée. Cette compétence est plutôt surprenante et doit peut-être quelque chose à la longue expérience de notre peuple dans son exercice de la démocratie directe, où chaque initiative populaire s’accompagne d’opérations de terrain, parfois très créatives dans la collecte et le dépôt des signatures nécessaires.
La première approche procède davantage d’un ADN révolutionnaire, l’autre d’une forme de modestie terrienne, qui n’est pas sans rappeler la définition des deux peuples qu’en fait Metin Arditi dans ses Dictionnaires amoureux de la France et de la Suisse : le panache comme quête des premiers, l’ancrage à la terre et l’humilité comme caractéristiques des seconds.