L’essoufflement démocratique se fait ressentir dans tout l’Occident. Partout, les taux de participation aux élections sont en diminution constante. À ce sujet, l’année 2023 revêt pour Genève une importance particulière, car ponctuée de deux vagues d’élections cantonales et fédérales. C’est dans ce contexte que la chancellerie de l’État de Genève met au concours une campagne qui aura pour objectif de stopper l’hémorragie et de faire remonter le taux de participation. Celle-ci devra se décliner dans les médias traditionnels, sur les réseaux sociaux et sur le terrain, sur lequel des concepts participatifs sont attendus.
La majorité silencieuse est ciblée, et les jeunes plus particulièrement. Les Z, on le sait, s’informent de moins en moins via les médias traditionnels et ne se sentent pas réellement représentés par les élus. Ils préfèrent souvent les actions de revendications que le passage par le scrutin pour se faire entendre. colegram propose donc des portraits studio dans lesquels les sujets sont valorisés pour leur jeunesse, leurs couleurs originales et leurs looks affirmés. Cependant, d’un geste qui appelle au silence, les personnages effacent leur propre bouche, comme pour s’auto-censurer. L’accroche et la signature donnent la clé: « Pour que ta majorité ne reste pas silencieuse… Fais entendre ta voix: vote! »
Une stratégie originale est déployée. À l’image de la génération qu’elle vise, la campagne propose une diffusion à contre-courant : elle divulgue ses messages avant même d’en avoir abouti la production. En commençant par publier les maquettes de campagne durant une opération de casting largement distribuée sur les réseaux, en abordant aussi précocement que possible les thèmes dans la diffusion de capsules vidéo, en débutant ses vagues média par de l’affichage vert visant principalement les étudiants, elle cherche à occuper le terrain avant l’omniprésence de la communication des partis. Elle fait donc le pari d’être ainsi mieux considérée par la jeunesse.
La participation s’entend non seulement comme un résultat attendu, mais comme un moyen d’y parvenir. Les différentes phases de conception et de réalisation de la campagne sont donc alimentées de recherches de contributions du public visé.
Premièrement, le casting pour les shootings fait l’objet d’une pré-campagne sur les réseaux sociaux et sur le terrain, par la mise en place d’un stand dans un grand centre commercial de la région.
Ensuite, les interviews vidéo sont préparés et menés avec une équipe de Junior Entreprise, émanation entrepreneuriale de la Haute École de Gestion. Cette démarche facilite grandement la prise de contact et la confiance des échanges avec les étudiants de 4 hautes écoles, représentatives des couches sociales du canton, dans lesquelles les témoignages sont recueillis.
Les actions de terrain, enfin, sont réalisées à grand renfort de main d’œuvre de jeunes adultes recrutés via une agence de placement temporaire.
Les conséquentes vagues d’affichage se déclinent en combos TPG, en affichage communal, en affichage vert dans les lieux culturels et les universités ainsi que sur des supports exceptionnellement mis à disposition dans la cour de l’Hôtel de Ville. Sur les réseaux sociaux sont diffusés 4 capsules vidéo de témoignages, des carrousels didactiques expliquant visuellement ce qu’il est possible de faire au moyen des listes électorales et une production de contenu alimentée par l’actualité de la campagne. Sur le terrain enfin, 3 opérations au total sont mises en place: une action de guérilla marketing plaçant des bennes à papier rhabillées dans les lieux à fort passage, une manifestation silencieuse de figurants-militants aux bouches scotchées et un « clean tag » à grande échelle, recouvrant l’ensemble de la traversée de la plaine de Plainpalais d’emoji muets, marqués à la craie.
Les concepts originaux des actions de terrain, actionnés par une communication en amont à la presse, ont permis une couverture importante des médias régionaux. Des articles dans La Tribune de Genève, un sujet sur Léman Bleu et un reportage au 12:45 de la RTS ont permis de considérablement augmenter la portée du budget médias alloué à la campagne.